Qu'on dise et lise tout et parfois n'importe quoi sur le climat est une chose. Que les journalistes aient une culture scientifique proche de zéro, que nos élus aient de grosses lacunes, aussi. Mais que de manière de plus en plus autoritaire, et surtout très cadré et encadré, tout ceci est repris en main, en est une autre. Et devrait à tout le moins inquiéter.
On se rappelle en 2022 du flop de la formation de sensibilisation aux enjeux climatiques dispensée aux députés par huit scientifiques dépêchés pour l'occasion : une trentaine (sur la centaine d'inscrits parmi 577 députés) avait suivi.
Depuis, le petit monde politico-médiatique s'est mis au pli. Reporterre, qui n'est pas à une exagération et un militantisme près, a désormais sa charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique. TF1 prévoit de former tous ses journalistes d'ici 2024 quand France TV a joint à sa formation un JT Météo Climat (première mondiale, cocorico, on fait ce qu'on peut) et une cellule Planète.
Manifestement, ce n'est pas suffisant. C'est ainsi qu'a germé l'idée, dans la lignée du DSA, d'une proposition de loi pour, en gros, bannir tout discours climato-sceptique. L'objectif est d'interdire dans le débat public toute remise en question des dérèglements climatiques, tout comme de leur cause anthropique. Au nom de la science, ou plus exactement du consensus scientifique.
"L’objectif de ce travail parlementaire est de fiabiliser l’information, explique le député PS Stéphane Delautrette. On veut réfléchir à la quantité autant qu'à la qualité. On veut des informations basées sur des faits scientifiques. Tout est envisageable pour y parvenir, mais on ne connaît pas encore les leviers : c’est tout l’objet des auditions qui seront conduites à la rentrée. Je ne peux donc pas dire s'il y aurait des sanctions : rien n'est écarté".
Derrière le groupe de députés transpartisan (mais sans le RN) qui dès ce mois de septembre va entamer les auditions pour voir comment faire aboutir leur idée, il y a un intense lobbying. Et notamment de la part de Quote Climat, une association drivée par des attachés ou ex-attachés parlementaires qui milite pour donner plus de place à l’écologie dans l’espace médiatique et le débat public à coups de quotas (20 % de temps médiatique dédié aux questions climatiques et de biodiversité.) Et tant pis si cela risque de tourner au matraquage contre-productif.
Bon. Bien. La suite parait autrement plus compliquée. Il va d'abord s'agir de comprendre ce que l'on entend par "climato-scepticisme", de cerner et borner les enjeux. Et ce au regard des incertitudes, encore passablement nombreuses. Au regard des modèles climatiques, pour le moins imprécis. Au regard aussi de l'évolution des connaissances. Une contre-vérité aujourd'hui ne peut-elle pas être une vérité demain (et vice versa) ?
On souhaite bien du courage à celui qui va contrôler et sanctionner tout ça. Et qui d'ailleurs ? Attention, le premier qui dit "ministère de la vérité" est un complotiste.
Surtout, le texte s'il voit le jour risque de ne pas aller bien loin, façon loi Avia qui s'est cassée les dents sur l'épreuve (annoncée) de la constitutionnalité. Car la proposition de loi, telle que projetée, va à l'encontre de la Déclaration des droits de l'Homme et de son article 11 (la libre communication des pensées et des opinions) et de la Constitution et de son article 100 (la liberté d'expression est garantie à tous). Ce doit être un détail.